La justice face aux violences sexuelles : rencontre avec Rémi Schwartz Procureur de la République à Cambrai

Mardi 10 avril la Médiathèque D’Agglomération de Cambrai organisait donc cette conférence, 2ème événement présentés dans le cadre du cycle  » Des femmes et des Hommes » Que fait la justice face aux violences sexuelles? Les violences sexuelles englobent, les agressions sexuelles, les viols, le harcèlement sexuel, l’exhibition sexuelle.

Nous étions nombreux preuve, si il en fallait, que ce sujet délicat soulève de nombreuses interrogations. Une quinzaine de jeunes de l’Épide (Établissement Pour l’Insertion Dans l’Emploi) étaient présents.  dans le cadre du parcours citoyens, ils avaient préparé cette rencontre avec leur monitrice et de nombreuses questions à poser.

Rémy Schwartz a été juge d’instruction : Magistrat du siège (il prononce son jugement assis) juge et fait appliquer les décisions de justice.
Depuis 2015, il est procureur : Magistrat du parquet (il se lève quand il s’adresse au tribunal ou à la cour) engage des poursuite s et propose des peines.

Pour faire simple, il décide de ce qui va arriver à une personne qui a commis un délit.

L’affaire Harvey Weinstein (producteur de cinéma américain accusé par de nombreuses femmes de viols, agressions sexuelles et harcèlement sexuel a-t-elle eu des répercussions sur le nombre de plainte déposée ? Est-ce que les femmes viennent plus facilement ?

Non pas vraiment, par contre à l’occasion de ces affaires, nous avons reçu une dépêche du garde des sceaux, invitant les procureurs à veiller à ce que les plaignants soient informés des suites des plaintes.
Cela a donc été l’occasion de se pencher sur nos pratiques : Est-ce que l’on traite ce type de délinquance comme une autre ou pas ? J’aidécidé qu’il n’y aurait plus de classement sans suite sans en avoir informé le plaignant (personne ou association).

J’ai révisé ma procédure : on relit l’intégralité du dossier avant un classement sans suite, avant on ne lisait que le compte-rendu qui était un résumé de 3 pages. C’est vrai que cela allait plus vite quand on  3000 à 3500 décisions à prendre à 3, mais on perd des éléments quand une audition de 10 pages est résumée en quelques lignes.

Pour ce qui est de la prise en charge des victimes, elles sont soutenues, elles ont un avocat gratuit et on leur indique où le trouver, des psychologues sont formés à la prise en charge des victimes de viol. elles  ont immédiatement une prise en charge médicale. Nous sommes opérationnels.

De quoi est composé un dossier  de procédure pour agression sexuelle ?

Principalement des auditions (Acte, pour un magistrat, un policier, un gendarme, d’entendre une personne impliquée dans une procédure judiciaire : adversaires, témoins, experts. ) de la plaignante et si il est identifié de l’agresseur présumé. Les retranscriptions d’auditions représentent environ une dizaine de pages.

Il y a également des expertises psychologiques, des constatations médicales

Comment se passe une procédure ?

1/3 des plaintes sont des dénonciations les 2/3 sont des plaintes de victimes. En 1er lieu on doit avec les éléments savoir si l’on lance une enquête ou pas. Si vous constatez que votre amie a un oeil au beurre noir et que vous venez nous le signaler parce que vous êtes sur que son mari la frappe, tout ce que l’on peut faire c’est aller rencontrer votre amie et si cette dernière nous affirme qu’elle s’est juste cognée à une porte, nous ne pourrons rien faire de plus, nous ne pouvons pas enquêter sur la base de simple déclaration. Il faut savoir malheureusement que 80 à 90% des violences et des viols ont lieux au sein de la famille, un mari, un père, un beau-père un oncle… Et que beaucoup ne sont pas portées à notre connaissance.

Nous entendons les plaignants puis il y a enquête suite à cela 70 à 75 % des dossiers sont classés sans suite soit parce qu’il n’y a pas eu d’infraction (la plaignante voulait juste nuire à celui qu’elle dénonçait ou voulait juste de l’attention et nous pouvons dans certains cas, lui conseiller de voir les psychologues spécialisés) soit parce qu’il n’y a pas assez d’éléments.

Dans les 25 /30% des dossiers pris en charge, seul 1/3 aboutira à des poursuites et dans ce  tiers seul 15 à 20 dossiers aboutiront à une condamnation. Les agents qui reçoivent les plaintes ont une formation spécifiques. Mais les autres ont une feuille de route qui leur donne quelques pistes, surtout pour les agents qui sont de garde, si une personne vient déposer plainte la nuit et que l’agent spécialisé n’est pas là, il faut quand même pouvoir entendre la personne. C’est là que la victime peut prendre peur car on va lui dire que la personne n’est pas là qu’on va l’entendre, mais qu’il faudra revenir, mais il ne faut pas perdre de temps et relever tous les éléments en flagrance sur le moment car ces indices sont précieux. 

Dans la salle une personne (travaillant au sein d’une association intervient avec beaucoup d’émotion)

Les victimes ont besoin d’être reconnues pour pouvoir se reconstruire et ce que j’entends,  c’est qu’il faut sans cesse prouver que vous avez été violée. Si vous n’avez pas de traces, c’est que vous ne vous êtes pas défendues, on demande aux victimes comment elles étaient habillées … Nous ne voulons plus de ce genre de question.

Je peux vous garantir que nous ne portons aucun jugement moral, mais il faut faire très attention et nous n’avons nullement l’intention de condamner un innocent, il faut donc des éléments. La présomption d’innocence

La peine est-elle plus grave si la victime est mineure ?

Un adulte n’a pas le droit d’avoir de relation sexuelle, attouchement ou quoi que ce soit avec un mineur de moins de 15 ans. Avoir une relation sexuelle avec un mineur de 15 à18 ans est un délit si l’adulte en question a autorité sur le mineur. La peine encourue dépendra de cela

Toute personne vous tous, vous pouvez et vous avez même l’obligation de dénoncer des faits de violence quel qu’ils soient sur mineurs, en tant que procureur j’ai un rôle de protection de mineurs, il fat nous alerter. Lorsque les faits concernent des mineurs, il y aura enquête.

Intervention d’un personnel de santé :

Une jeune fille de 13 ou 14 ans vient me voir, elle veut prendre la pilule parce qu’elle a des relations sexuelles que dois-je faire ?

Et bien elle a tout à fait le droit d’avoir des relations sexuelles nous n’en voudront pas à la jeune fille, il faut le signaler si la personne avec laquelle elle a des relations est majeur et c’est lui qui sera inquiété !

Le nombre de grossesses de jeunes filles de moins de 15 ans est un indicateur de pauvreté d’un endroit

Si un enfant de 8 ans par exemple agresse sexuellement son petit frère ou sa petite soeur de 4 ans que va-t-il se passer ?

Il y a aura enquête de toute évidence et on se demandera comment les enfants ont pu avoir cette idée. A-t-on oui ou non à 8 ans conscience de l’interdit, voilà ce que nous allons devoir déterminer. Si effectivement il est avéré qu’il avait conscience de l’interdit, on pourra le déclarer coupable et prendre des mesures éducatives (placement, suivi…) mais un mineur de moins de 13 ans ne peut pas être condamné!

 

Si une femme porte plainte mais qu’elle la retire ensuite que se passe-t-il ?

Et bien la décision continuer les poursuites m’appartient et qu’elle retire ou non la plainte ne modifie rien, c’est si elle refuse de porter plainte que nous avons plus de mal. Certaines personnes préfèrent ne rien dire et la justice ne fera pas changer les mentalités. Notre société évolue doucement l’égalité Homme Femme progresse et la justice suit l’évolution. Il y a des hommes qui sont victimes d’agression, de viol par un autre homme, c’est moins fréquent beaucoup moins mais il y en, mais il doit y en avoir beaucoup qui n’ose pas parler car la aussi la société n’est pas prête, ils ont plus honte qu’une femme de s’être fait agresser surtout quand c’est par une femme.

Pourquoi on parle de prescription ?

En France le seul crime imprescriptible est le crime contre l’humanité. Pour les violences sexuelles c’est 20 ans après la majorité de la victime. 6 ans pour les autres délits. Forcément quelqu’un qui vole votre portefeuille vous allez lui en vouloir et le lendemain aussi mais 6 ans après vous vous en ficherez. C’est humain, il y a comme une forme de « pardon » mais bien entendu pour certains crimes, c’est douloureux à entendre alors là encore, on trouve des moyens je prends l’exemple de Dominique Cottrez qui a commis un octuple infanticide, la prescription était de 10 ans pour ce crime et les enfants étaient avant 2000 soit 10 avant la découverte des petits corps.  Sauf le 8ème pour lequel il y avait un doute…  Elle devait être punie, il a fallu trouver des éléments, c’est comme cela que l’on fait évoluer avec les jurisprudence la loi évolue.

 


Enfance en danger 119 :
Informations, par une équipe de professionnels et d’administratifs, aux mineurs, aux familles et à toute personne confrontée à un risque de mise en danger d’enfant imminent ou non ou à une mise en danger avérée

Par téléphone 119 (appel gratuit) 24h/24 et 7jours/7.

Par messagerie Accès au formulaire en ligne ici permettant de poser par courriel une question d’ordre général aux services du 119.

Attention : ce formulaire ne permet pas de signaler un cas d’enfant en danger, mais de demander des informations et de renseigner, notamment les enfants. Pour signaler un cas de maltraitance, il convient de composer le 119.

Le signalement doit être accompagné, dans la mesure du possible, des informations suivantes :

nom et prénom de l’enfant, domicile habituel, date et lieu de naissance, nom et adresse des parents, fratrie, détenteurs de l’autorité parentale…,
et faits constatés (date et lieu, descriptif détaillé et précis des faits, certificat médical éventuel…).

Lorsque la situation de l’enfant est d’une extrême urgence (par exemples, en cas de maltraitance, de violences sexuelles), il est possible de saisir directement le procureur de la République.


Pour ce qui est des violence faites aux femmes n’hésitez pas à parcourir l’article https://leschroniquesducambresis.fr/2017/11/21/le-25-novembre-journee-internationale-pour-lelimination-de-la-violence-a-legard-des-femmes/ Vous y retrouverez les numéros utiles ainsi que les adresses !

Tribunal de grande instance de Cambrai
03 27 73 37 37

Château de Selles rue Froissart – BP 379
59407 CAMBRAI CEDEX
Ouvert Du Lundi au Vendredi : de 08h00 à 17h00

 

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